Oui, les mutuelles sont coupables… Encore faut-il savoir de quoi.

Une tribune de Philippe Mixe

Depuis des mois, il y a une petite musique fort dérangeante que joue sans discontinuer une partie de la classe politique : si les Français ont des difficultés d’accès aux soins, ce sont les mutuelles qui en sont la cause. Idem pour les inégalités entre catégories sociales… Et tout cela avec des contrats de plus en plus chers, notamment pour les retraités.

C’est le sens des petites phrases d’Olivier Véran qui vient de saisir le Hcaam sur la redéfinition des rôles entre Sécurité sociale et assureurs complémentaires.

Soyons clairs. Le gouvernement serait bien inspiré de ne pas céder à la tentation des fake-news ou, plus grave, de la réécriture de notre histoire sociale.

Les mutuelles sont coupables. Loin de le nier, nous le revendiquons. Nous sommes coupables d’avoir voulu, fidèles à notre principe de solidarité et notre ambition de protéger la plus large part de la population, répondre aux défaillances de l’État. Coupables de masquer l’incurie des décisions publiques.

Le gouvernement cède à la facilité (comme toujours ?) en pointant du doigt les mutuelles et les complémentaires santé, plutôt que de s’interroger sur ses propres responsabilités dans le maintien d’une organisation de la santé totalement inadaptée.

Si les mutuelles sont devenues indispensables pour les Français, c’est bien parce que les gouvernements qui se sont succédé ont permis le développement d’une santé d’exclusion qu’il a bien fallu rendre accessible au plus grand nombre. Ce fut le cas pour l’abandon du dentaire et de l’optique, ou de l’acceptation des dépassements d’honoraires, élément clé de la politique de fuite en avant des pouvoirs publics.

Indispensables, elle le sont également pour le gouvernement lorsqu’il met en œuvre sa réforme 100% Santé qui repose, en très grande partie, sur l’intervention de nos mutuelles.

Le ministre regrette le prix des contrats pour les retraités. La coupe est pleine ! Elle déborde… Si cette évolution est due aux règles actuarielles imposées par les pouvoirs publics, elle est surtout due à la généralisation des contrats d’entreprise qui ont exclu de la mutualisation les retraités, les exclus sociaux et les plus jeunes. Nous l’avions crié à l’époque, on nous le reproche aujourd’hui. Le danger est permanent d’ailleurs, et saluons l’engagement des mutuelles pour préserver la solidarité dans la réforme de la protection sociale complémentaire des agents publics.

Trop chère la complémentaire santé ? Il ne faut pas oublier que cet élément essentiel du système de soins supporte 14,27% de taxes, hors contribution covid…

Les gouvernements changent, les méthodes restent. Hier, le fil rouge de l’action gouvernementale était la maîtrise comptable des dépenses pour satisfaire aux exigences communautaires (que nous nous sommes nous-mêmes imposées). Aujourd’hui, la crise sanitaire a imposé le « quoi qu’il en coûte » et révélé les bienfaits de l’action collective. Une découverte pour certains, mais pas pour nous. Comme il a découvert ce qu’il a soigneusement veillé à ignorer hier, le gouvernement non content d’avoir encadré à outrance nos activités, a la tentation de mettre la main sur celles-ci. Comme si cela allait régler les véritables problèmes.

Qu’on ne s’y trompe pas : les Français n’accepteront pas que l’on mette à bas un système qu’ils jugent très majoritairement favorablement. Cela est trop sérieux pour être réformé en douce. Les candidats à la prochaine élection présidentielle devront se prononcer sur le sujet. Comptez sur nous pour le leur demander.

Philippe Mixe
Président de la FNIM