Les mutuelles ont-elles leur place dans le nouveau monde d’Emmanuel Macron ?

La presse a fait état d’une « réflexion » sur une nouvelle réforme du dispositif ACS. Si cette information était confirmée, le gouvernement fusionnerait la gestion de la CMU-C et de l’ACS avec pour objectif répondre à la question cruciale de la renonciation à ce droit.

Cet argument n’est pas nouveau puisqu’il justifia, voilà quatre ans, la précédente réforme qui substitua à la liberté contractuelle un encadrement des contrats et du libre-choix de la personne concernée par un dispositif de sélection.

La réflexion consiste donc, une nouvelle fois, à faire porter aux opérateurs la responsabilité de l’échec relatif du dispositif ACS. Depuis son origine, celui-ci a du mal à se faire connaitre du grand public. Les chiffres du Fonds CMU et certaines études parlent d’eux-mêmes : s’il y a une nette amélioration du taux d’utilisation des attestations délivrées par les caisses primaires, les demandes d’attestations ne concernent qu’une part de la population potentiellement concernée.

Si on peut comprendre facilement que la fusion des dispositifs ACS et CMU-C revient à donner aux caisses primaires la même capacité d’intervention sur l’ACS que sur la CMU-C, et donc à siphonner les effectifs des mutuelles, on ne voit pas en quoi, sauf à changer radicalement de logique, cette évolution serait de nature à faire mieux connaître le dispositif.

Ce n’est pas l’intervention d’une complémentaire santé qui est à la source du problème, mais l’absence de notoriété de l’ACS. Cela est tellement évident que lors de la précédente réforme les pouvoirs publics avaient inscrit le devoir d’information dans le cahier des charges, et s’étaient engagés à mener une grande campagne d’information. Si les complémentaires santé ont joué le jeu, les campagnes publiques, inaudibles, n’ont laissé que de maigres souvenirs. Une réalité : elles n’ont pas touché les publics concernés.

Les mêmes causes produiront les mêmes effets. Dans ces conditions, comment comprendre l’acharnement des pouvoirs publics si ce n’est par leur volonté de réduire les complémentaires santé, structures de droit privé, en une sorte de second étage de sécurité sociale généralisée et fermement encadrée par le gouvernement. Une sorte de nationalisation rampante de l’assurance complémentaire santé.

Si elles ne sont pa s accompagnées d’une profonde réforme de l’offre de soins, on subira les effets pervers de telles interventions. Les restrictions de remboursements des contrats encadrés ne peuvent qu’inciter à souscrire une autre forme de contrats. On aboutit ainsi à la mise en place d’un système de santé à deux, trois, voire quatre vitesses. Ce n’est pas notre conception du progrès social.

Enfin, au plan politique, une telle réflexion est aux antipodes de la méthode de travail annoncée en son temps par le candidat Emmanuel Macron. Devant la fine fleur du mutualisme, ce dernier n’avait-il pas annoncé sa volonté de faire confiance à la société civile et aux acteurs de terrain. Faire confiance, oui, mais pour quoi ?

Une part de la politique macronienne revient à nous prendre des adhérents (régime étudiant, organismes conventionnés gérant le RSI et maintenant l’ACS) quand l’autre partie, marquée par un sur-encadrement administratif, nous enlève toute liberté d’innovation au bénéfice des adhérents que nous pouvons encore sauver.

Une autre conséquence est que pour dépasser les limites des complémentaires santé étatisées, les Français n’auront pour seul choix que de se tourner vers d’autres types de contrats (nous vivons encore dans l’ère européenne de la libre prestation de services), mettant en place non pas une médecine à deux vitesses, mais une santé à trois, quatre, voire cinq rapports !

« Si le gouvernement a confiance dans notre capacité à accepter sans sourciller la mise en œuvre d’une disparition programmée de notre liberté, voire de nos activités, il se trompe lourdement, et nous ne souscrirons pas. Si c’est pour apporter notre expertise dans la mise en œuvre de solutions intelligentes car concertées, nous sommes présents. Malheureusement, jusqu’ici, aucune invitation à travailler en ce sens n’a été émise » indique Philippe Mixe, président de la Fnim.