Solvabilité 2 : Recherche proportionnalité désespérément !

Au lendemain de l’adoption, par le Parlement européen, de la directive Omnibus II permettant de rendre effective la mise en place de Solvabilité II, de nombreux acteurs se sont félicités de cette décision, car les textes permettraient, grâce au fameux principe de proportionnalité, de régler les problèmes des mutuelles de proximité. Principe de proportionnalité dont certains n’hésitent pas à revendiquer la paternité !

Une telle approche est précipitée, incomplète et fausse, affirme la Fnim. Explications.

Précipitée car le principe de proportionnalité n’est pas une création de Solvabilité 2, mais est inhérent à tout texte législatif européen. Il s’impose naturellement et obligatoirement, au même titre que le principe de subsidiarité. Ainsi en ont décidé les rédacteurs du Traité sur l’Union européenne dans son article 5, qui stipule que les moyens mis en œuvre par l’Union pour atteindre les objectifs des traités ne doivent pas excéder ce qui est nécessaire.

On relèvera que le protocole communautaire d’application des principes de subsidiarité et proportionnalité prévoit que tout texte législatif devra être accompagné d’une fiche contenant des éléments circonstanciés permettant d’apprécier le respect de ces principes, et ses implications sur la règlementation à mettre en œuvre par les Etats. Une fiche qui manque bizarrement à Omnibus 2 et à Solvabilité 2 (seul le CEIOPS a publié, en anglais, un papier imprécis sur la proportionnalité en 2008), et qui conforte la Fnim lorsque par suite elle voit dans la mise en œuvre de la directive un risque d’arbitraire. Ce n’est pas au régulateur de définir, au cas par cas, comment doit être appliquée la proportionnalité !

Incomplète car affirmer que la proportionnalité vient se substituer à toute possibilité d’exclusion du champ de la directive Solvabilité II est méconnaître la rédaction de celle-ci. En effet, dans son article 5 la directive prévoit qu’elle ne s’applique pas, en matière d’assurance non-vie, aux « opérations des organismes de prévoyance et de secours dont les prestations varient d’après les ressources disponibles et dans lesquels la contribution des adhérents est déterminée forfaitairement ». Ce qui est une base fondamentale du fonctionnement des mutuelles.

On peut renforcer cette analyse en rappelant les dispositions du 4ème considérant de la Directive qui explique qu’ « il y a lieu que certaines entreprises fournissant des services d’assurance ne soient pas couvertes par le dispositif instauré par la présente directive en raison de leur taille, de leur régime juridique, de leur nature – en tant qu’entités étroitement liées aux régimes d’assurance publics ». Ce qui concerne à l’évidence l’essentiel des mutuelles complémentaires santé.

Fausse si l’on regarde les possibilités d’application de ce principe de proportionnalité. Bien entendu, Omnibus II autorise les autorités de contrôles à exonérer les petites et moyennes structures de la fourniture de certains états prudentiels. En pratique, cela ne se traduirait que par quelques milliers d’euros et quelques heures de travail économisés dans l’année, ce qui est dérisoire.

Mais qu’en est-il du reste, donc de l’essentiel ?
Concernant la formule standard, elle est par principe irréductible donc non proportionnalisable. Et la gouvernance ? Les mutuelles devront toutes mettre en place quatre fonctions de contrôle des risques quasi indépendantes, créer une fonction actuarielle et un service d’inspection d’audit interne indépendant, ce qui n’a pas de sens pour les petites structures employant peu de personnel.

En fait, le principe de proportionnalité est neutralisé par la précision excessive des exigences de la directive ainsi que par le niveau de détails très avancé des mesures de niveau 2 et de niveau 3 contraignantes : la précision des exigences ne laisse pas de marge de manœuvre à la proportionnalité. Nous sommes dans un modèle binaire : ou on applique, ou on n’applique pas.

« Serions-nous les seuls à lire les textes dont nous débattons ? », s’interroge Philippe Mixe, Président de la Fnim qui précise que « le dossier est loin d’être clos. Forte des arguments inscrits dans ces textes, la Fnim prendra prochainement des initiatives fortes pour faire valoir les droits des mutuelles de proximité, et notamment pour aller vers leur exclusion de Solvabilité II ».